L’Australie n’a pas que des plages, une grande barrière de corail et des koalas. Elle a aussi de la neige et des kangourous qui sautent (qui ‘hoppent’ en anglais local) et ont inspiré le nom de la course du circuit Worldloppet qui se déroule à Falls Creek, à 1600 mètres d’altitude et quelques heures de route de Melbourne. Enfin, comme l’a dit une Américaine croisée au 35ème kilomètre de la course: How far do we have to go to ski!
Falls Creek est avant tout une station de ski alpin. Elle propose également des activités de luge, fat bike, ski nordique ou de randonnée et… ski de fond. On croise des Chinois peu habitués à la neige (et des Chinoises fort malhabiles), et des Indiens qui sont partagés entre tenter le ski ou se promener tranquillement à pied dans la station. Les inscriptions en russe sont sûrement pour les skieurs élite de la course de ski de fond – ceux dont on voit le dos au départ et qu’on ne revoit jamais plus ensuite.
Les Australiens sont réputés être amateurs de sports outdoor. On trouve ainsi des colonies d’adolescents qui partent ski de randonnée aux pieds et gros sac sur le dos, camper dans la neige à quelques encablures de la station. D’autres évoluent en tenue tout à fait décontractée, semblant supporter aussi bien la chaleur estivale (plus de 40°) que la fraîcheur hivernale.
Pour avoir de la neige, il faut venir en août, explique une connaisseuse pour justifier les prix prohibitifs de l’hébergement à cette période. Quoique… Les skieurs locaux, rencontrés au détour des pistes, ne sont pas avares en anecdotes et souvenirs d’années où la course de ski de fond était tracée sur le plateau le plus haut mais où il y avait davantage de boue que de neige sur la piste, le tout sous une pluie diluvienne… On en frémit et on guette les prévisions météo avec anxiété !
Le problème de Falls Creek, dixit un secouriste de la station, c’est la météo. Falls Creek est proche de la côte. Si vous regardez les prévisions, il est courant d’avoir cinq jours de précipitations ou plus pour la semaine à venir. Comme il ne fait pas froid, c’est souvent de la pluie… Il y a toujours du vent, entre 20 et 60km/h sur la semaine où j’y étais, et parfois du brouillard. On se croirait en Colombie, avec des nappes qui se déplacent très vite, laissent très occasionnellement apparaître un bout de ciel bleu, voire un rayon de soleil pour se bâcher à nouveau dans les trente secondes qui suivent. Et qui dit vent dit… spindrift. De la neige soulevée par le vent qui vient vous piquer férocement le visage et vous aveugler. Pas pratique pour skier…
Il y a beaucoup de neige cette année, environ 150cm en haut des pistes (à moins de 2000 mètres d’altitude). La plupart des stations françaises s’en contenteraient ! Les 60km de pistes de ski de fond (plan) ne sont pas toujours (proprement) damées (l’état des pistes). Certaines pistes ne sont pas damées pendant plusieurs jours de suite. Certaines sections permettant d’accéder à des boucles ne sont pas damées, alors que la boucle est damée… Le damage est fait le soir; s’il neige (et vente) la nuit, tant pis pour le lendemain… Il y a en fait un air de sauvagerie islandaise, dans le genre vent, brouillard, forte humidité ambiante, début de congères, drifts et « rollers« , plus les dévers, qui rendent le parcours… sportif ! Ajoutons une neige souvent (très) molle, puisqu’il fait plutôt chaud (3 à 4 degrés est une température ‘normale’), et on comprend pourquoi on fatigue exagérément au regard d’une moyenne horaire finalement bien basse… Certains coureurs de la Worldloppet font cette remarque: la course est lente avec toujours beaucoup de vent et des pistes peu rapides (enneigées quand il fait mauvais, gorgées d’eau quand il pleut, collante quand le soleil tape). ‘Sticky‘, la neige…
Le balisage est globalement correct même s’il manque des indications à certaines bifurcations (principalement Pretty Valley Road, McKay loop et Stockyard) et qu’on a alors du mal à trouver la piste repérée sur le plan.
Les paysages sont vallonnés avec un mix d’endroits dénudés et de forêts / d’arbres. Le lac de retenue hydroélectrique de Rocky Valley agrémente la vue.
Une écrasante majorité de coureurs australiens participent aux trois courses organisées le 24 août. Quelques nord Américains, quelques Européens (Finlande, Allemagne, une dizaine de Français), de rares Asiatiques. Environ 360 partants sur les 42km, 350 sur le semi-marathon et 400 sur le 7km. Moins de 20% de femmes sur le 42km contre près de 50% sur le 21km. Les courses se font en skating, en lien avec les pratiques australiennes: très peu de personnes sont en classique sur les pistes en dehors des débutants.
La course de 42km consiste en une grande boucle, qui concentre l’essentiel du dénivelé, et d’une boucle plus courte (recoupant partiellement la première, sans les plus grosses montées), pour un dénivelé positif total de l’ordre de 600 mètres. Les conditions météorologiques peuvent bien sûr amener l’organisation à modifier le parcours.
Il est possible de laisser des affaires au départ mais l’organisation ne fournit pas de sac. Le départ se trouve à 600m environ du parking de Windy Corner, que la plupart des skieurs font à pied pour ne pas éparpiller prématurément la poudre magique posée par le farteur sur les skis !
Le départ du 42km est échelonné en quatre vagues, toutes les minutes, puis cinq minutes après partent les skieurs du 21km. La trace initialement très large se réduit rapidement à deux skieurs de front. Il y a un peu de trafic sur les 5 premiers kilomètres puis cela se régularise, avant de reprendre à nouveau à chaque fois que la première boucle du 42km rejoint l’itinéraire (plus court) du 21km. On peut skier tout à fait tranquille sur la seconde boucle du 42km.
Cette année, c’est grand beau temps le jour de la course mais aussi grand vent. Des pointes à 50km/h aux endroits les plus exposés et peu d’endroits pas exposés à part le départ… J’adore quand le vent me pousse à 20km/h sur le plat sans même devoir pousser sur les bâtons. J’aime moins quand, un peu plus loin, il faut lutter pour avancer à petite vitesse avec le vent de face… Les différences de vitesse pour un skieur donné sur cette course ne me semblent globalement pas tant liées aux montées et descentes mais davantage au vent de dos ou de face. Un top skieur a indiqué avoir eu besoin de quatre fois le temps habituel pour la fin de la montée la plus difficile, avec le vent de face sur le secteur le plus exposé!
La neige, plutôt compacte et rapide sur le premier tour, s’est ensuite dégradée avec le soleil, la température douce (4°) et les passages. Elle est devenue bien molle. Même avec le vent de dos, nonobstant la fatigue, ça filait moins vite au second tour qu’au premier !
En dehors des ‘friends and relatives‘, il y a très peu de spectateurs autour de la course. Celle-ci démarre au bout de la route et se déroule en marge de la station qui ‘vit sa vie’, celle des skieurs alpins et snowboarders. Les bénévoles eux ne ménagent pas leurs encouragements et sont en nombre aux différents ravitaillements : un grand merci à tous ceux qui ont contribué à l’organisation de la Kangaroo Hoppet ! Avec peut-être une suggestion : pourquoi ne pas remettre de médaille à l’arrivée (comme les autres courses de la Worldloppet) ? Ca fait certes un peu ‘kitsch’ mais il est quand même sympa d’avoir sa médaille de finisher !
Et au fait ! je n’ai pas vu de kangourou sur la piste malgré les promesses du logo !
Côté pratique :
Melbourne est l’aéroport international le plus proche et l’on peut ensuite prendre un shuttle bus qui rejoint Falls Creek en 5 à 6 heures. Une voiture de location nécessite d’avoir des chaînes (les pneus neige n’existent pas en Australie) et de payer un péage pour le parking à Falls Creek.
Pour les étrangers qui ne veulent pas transporter leurs skis et bâtons, le magasin Falls Creek Cross Country, au départ des pistes, propose à la location des modèles de qualité raisonnable sous condition de réserver longtemps à l’avance. Le fart liquide est mis gracieusement à disposition, le fartage à chaud pouvant être facturé en sus. Le fartage ‘course’ peut être demandé auprès des jeunes de l’équipe nationale qui proposent plusieurs forfaits pendant la semaine précédant l’épreuve. Le prix pour ce matériel, location et fartage, est raisonnable. L’accès aux pistes est, lui, gratuit.
Si la crème solaire est proposée gracieusement par le magasin de location ci-dessus, je n’ai pas trouvé de tablettes d’electrolytes ni de poudre énergétique type Overstim. Du Gatorade est en vente au supermarché. La boisson énergétique locale 32gi est présente au salon et sur les ravitaillements de la course mais, globalement, mieux vaut venir équipé(e) en la matière (c’est moins encombrant que les skis !).
Il faut également récupérer le dossard. Le ‘PC course’ est curieusement situé à Mount Beauty, à 30km de Falls Creek. Ceci est peut-être en lien avec le lieu de résidence des bénévoles mais reste peu pratique pour ceux qui se rendent directement à Falls Creek en bus et n’ont pas de moyen de déplacement. L’organisation peut néanmoins déposer le dossard au Falls Creek Management Resort sous réserve d’être prévenue plusieurs jours à l’avance.